n° 1258 du 14 février 2007, pages 14 et 15
"Prévention de la délinquance. Projet de loi.
Le rôle du vétérinaire sanitaire n'est pas reconnu.
La commission mixte paritaire, chargée de proposer un texte sur les dispositions du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance qui demeurent en discussion, s'est réunie à l'Assemblée nationale le 20 février dernier. A l'heure où nous mettons sous presse, le vote définitif est imminent. Finalement, c'est la version issue de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale qui est retenue.
Le version de l'Assemblée nationale de l'article sur le durcissement de la législation relative aux chiens dangereux (12 bis) a été adoptée par la commission, avec la correction rédactionnelle du sénateur UMP Patrice Gélard (au deuxième aliéa de l'article L.215-3 du Code Rural). La commission a aussi voté l'article relatif à l'évaluation comportementale de certains chiens (12 ter A) dans la version de l'Assemblée.
Les chiens "dangereux" encourent l'euthanasie dans des délais très courts
Il ressort ainsi que, "en cas de danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le maire ou, à défaut, le préfet, peut ordonner par arrêté que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci et, le cas échéant, faire procéder à son euthanasie". "Est réputé présenter un danger grave et immédiat" le chien de deuxième catégorie qui est détenu par des personnes non autorisées (selon la loi de janvier 1999), soit qui circule dans un lieu où sa présence est interdite ou qui n'est pas muselé et tenu en laisse dans les conditions prévues. Ces chiens risquent désormais d'être rapidement euthanasiés, avant même d'avoir pu être vus par un vétérinaire.
La possibilité d'une certaine souplesse, pour que l'animal ne fasse pas les frais de la négligeance de son maître, n'a pas été retenue. Lors de non-respect de ces mesures, l'euthanasie pourra intervenir sans délai, dès l'obtention de l'avis d'un [vétérinaire] désigné par la Direction des Services Vétérinaires. Or "cet avis doit être donné au plus tard dans les 48 heures après le placement de l'animal. A défaut, l'avis est réputé favorable à l'euthanasie" retient la commission, en accord avec le texte de l'Assemblée. Si un chien de première ou de deuxième catégorie n'est pas déclaré en mairie, le préfet pourra mettre en demeure le propriétaire (ou le détenteur) de l'animal de régulariser la situation dans un délai maximum d'un mois. "A défaut de régularisation au terme de ce délai, le maire ou, à défaut, le préfet, peut ordonner que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à l'accueil et à la garde de celui-ci et peut faire procéder sans délai et sans nouvelle mise en demeure à son euthanasie."
Le maire peut demander une évaluation comportementale
Une évaluation comportementale peut être demandée par le maire pour n'importe quel chien. Elle est alors "effectuée par un vétérinaire choisi sur une liste départementale". Un décret devrait déterminer les conditions d'application de ce dernier article. L'obligation d'une visite périodique pour les chiens de première et de deuxième catégorie n'est donc plus d'actualité, ce qui est accueilli positivement par les clubs des races concernées.
L'idée d'une visite comportementale pour tous les chiens ayant mordu n'est pas non plus retenue, ce qui est dommage, car il restera difficile d'évaluer les causes et d'effectuer des statistiques sur ces animaux. Ces évolutions législatives n'apportent donc pas de solution à la problématique des chiens mordeurs en France.
En outre, la remise d'un rapport trimestriel est prévue... Espérons que sa sortie ne restera pas un voeu pieux, comme ce fut le cas pour celui de la loi du 6 janvier 1999, qui demeure plus virtuel qu'autre chose!
Le texte adopté par la commission soulève des interrogations sanitaires
La première question qui se pose est celle de l'adéquation de ces conclusions avec la réalité de terrain. En effet, les morsures en France relèvent de la sécurité sanitaire. Les risques de zoonose face à de tels accidents ne sont pas à négliger, de même que les conséquences parfois dramatiques des morsures. En outre, les études partielles montrent que la proportion d'accidents mettant en cause des enfants et des chiens de la sphère familiale est loin d'être anodine. Comment ce projet de loi entend-il prendre en compte cette réalité?
De même, la rage, même si elle est absente du territoire, demeure un spectre qui plane au-dessus de l'hexagone, avec l'éventualité d'une importation illégale, comme en témoigne le cas de rage venu du Maroc durant l'été 2004. Le sujet des morsures est donc une problématique sanitaire réelle. [...]
En fin de compte, ce sont les parlementaires qui ont défendu les positions les plus innovantes, car lors des débats sur ce projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, la notion même de catégorie a été controversée... une première depuis la loi du 6 janvier 1999!
[...]
Marine Neveux"
Je vous laisse constater à quel point les recommandations du groupe de travail ont été suivies (supprimer les catégories, responsabiliser les éleveurs et les propriétaires), calculer le nombre de chiens sans la moindre agressivité qui vont être euthanasiés dans un délai record juste parce que leur maître aura oublié la muselière, et méditer sur l'ensemble.
Vive la France.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire